Le drame national italien : les HOGAN

C’est le drame national de l’Italie, loin devant les ministres coquines et les tangentopoli.
Quand on en voit, on reste ébahis devant tant de laideur, on ne comprend pas.
Et puis, plus on est attentif, et plus on s’aperçoit qu’on est envahis, que chacun en possède. On est encerclés.
Du coup, on en parle timidement autour de nous, pour chercher à comprendre, si cela correspond à une tendance, à un nouveau concept qu’on n’aurait peut être pas saisi.
Puis, on découvre que ça coûte plus 400 €.
Et là on se retrouve devant l’incompréhension la plus totale.

HOGAN.

Bon, si vous ne comprenez rien, je vous fais le résumé de ce choc culturel assez violent qui se produit quand on étudie à l’université de la LUISS à Rome.
Non seulement les nanas sont surmaquillées, ont toutes des sacs Gucci, et des lunettes de soleil PRADA qu’elles gardent en cours (true story), mais en plus elles portent des HOGAN.

Mais qu’est-ce des Hogan, me demandez-vous, pauvres innocents encore épargnés par ce  fléau ?
Eh bien les Hogan sont un concentré de monstruosité. Ce sont des chaussures dont la particularité est de posséder un grand “H” sur le côté – qui selon les goût peut être pailletés, verni, rose… – mais aussi une semelle aussi épaisse que des chaussons orthopédiques de mère-grand.
Honnêtement on dirait vraiment des chaussures Tati à 3 francs 6 sous.
La tragédie des Hogan, c’est que précisément, elles coûte à peu près le centuple de 3 francs 6 sous (autour de 400 € en moyenne).

Les meilleurs moments de ma journée ont souvent lieu dans le bus, quand je découvre des nouveaux modèle insoupçonnés, tels que les hogan à talons :

Les Hogan à paillettes (relativement démocratisées chez les filles) – d’ailleurs cela me donne l’occasion de faire un éclaircissement. Les Hogan sont portées aussi bien par les filles que par les garçons, mais de façon générale, plutôt par les gens stylés. Du coup, il n’est pas étonnant de croiser des filles avec une petite robe cintrée noire, un manteau chic et ces espèces d’énormes écrase-merde pour les handicapés du pied. C’est vraiment such a FFP (FFP = fashion faux pas).
Ou bien encore les Hogan fa!on « reptile »…

Et du coup, pour lutter et faire de la prévention en France, j’ai décidé de faire un reportage photo sur le terrain à mes risques et périls, en me baladant nonchalamment dans la fac avec mon appareil photo.

Pour creuser un peu, j’ai essayé de comprendre en posant la question à mon coloc’ italien, Francesco.
Et il m’a expliqué toute la conception de la mode en Italie.
Ici, les magazines te disent quoi acheter, où l’acheter et combien ça coûte, et tout le monde se précipite sur le même modèle. C’est un peu une dictature de la mode.
Et gare à celui qui tenterait d’acheter une copie ou un modèle vaguement similaire, car il serait dès lors considéré comme gros plouc et deviendrait la risée de la fac.

On est bien loin des comportements français en matière de shopping, où tout l’intérêt de la mode réside dans l’exploit de porter un vêtement que personne d’autre n’a, de se créer son propre style.
Mise en situation :
“ Salut ma nana ! Ohlala, j’a-do-re ton petit blouson. Tu l’as trouvé où ?”
“Oh tu sais, je l’ai déniché dans une petite fripe toute mignonne que personne connaît à Belleville. D’ailleurs le patron c’est trop mon pote”
“ Mon dieu, il est trop bien coupé et c’est pile dans les tons de la saison… Tu pourrais pas m’y emmener dans ta fripe trop stylée et trop underground, moi aussi je veux trouver la perle rare ?! ”
“Mon chaton, je suis désolée, mais tu me connais, tu sais combien j’aime garder mes petites adresses pour moi… Tu m’en veux pas trop, hein bichon ?”

Bon là j’exagère peut être un peu, mais ce n’est pas non plus complètement un fantasme de la réalité chez les petites minettes du 6.

Et surtout j’ai gardé l’argument fatal pour la fin.
Hogan n’est pas une marque sortie de nul part, bien au contraire : c’est la marque “jeune” du très distingué TOD’S.
D’où le double drame quand on connaît la délicatesse des petits mocassins tod’s à la renommée internationale.

Pour ceux qui auraient besoin d’une comparaison pour véritablement comprendre l’étendue de cete absurdité, je dirais que c’est à peu près comme si Berlutti faisait des tongs. Ou Chanel des joggings.